Le trouble du sommeil lié à l’horaire de travail (THT) fait partie des troubles du rythme circadien, une catégorie de troubles du sommeil impliquant une désynchronisation entre le rythme circadien et l’horaire veille-sommeil approprié à l’environnement.
Il n’est pas toujours simple de tracer la ligne entre le THT et d’autres troubles du sommeil (ou tout simplement des difficultés de sommeil ponctuelles). Les plaintes reliées au sommeil sont particulièrement fréquentes chez les personnes dont l’horaire de travail est non conventionnel et celles-ci ne signalent pas nécessairement une pathologie. Il va de soi que le diagnostic de THT ne peut être posé de façon définitive que par un professionnel de la santé spécialiste du sommeil.
Selon l’académie américaine de médecine du sommeil (2014), les difficultés de sommeil liées au THT se caractérisent typiquement par une somnolence excessive durant les quarts de travail nocturnes et par une insomnie diurne lors des périodes allouées au sommeil. De façon générale, les personnes ayant un THT ont un sommeil de plus courte durée, mettent plus longtemps à s’endormir une fois au lit et ont plus de difficulté à maintenir leur sommeil.
Les symptômes du THT constituent une réaction naturelle de l’organisme face à des conditions environnementales allant à l’encontre de nos rythmes biologiques; ceci explique peut-être pourquoi ce trouble est relativement commun chez les personnes qui se voient contraintes de travailler à des heures irrégulières ou atypiques. En effet, les travaux de recherche suggèrent que près du quart des travailleurs avec horaires de travail en rotation, ainsi que près du tiers des travailleurs de nuit permanents ont un trouble de sommeil lié à leur horaire de travail. Ces statistiques montrent que vous n’êtes donc pas seuls dans cette situation.
La recherche suggère que le travail à des heures atypiques ou irrégulières peut avoir des répercussions à long terme sur la santé physique et psychologique. Par exemple, les personnes dont l’horaire de travail est non conventionnel seraient à risque accru de développer nombre de conditions médicales chroniques telles qu’un surpoids, une résistance à l’insuline, des maladies cardiovasculaires, des troubles gastro-intestinaux, ainsi que certains désordres métaboliques et hormonaux. Sur le plan psychologique, cette population est également exposée à une plus grande probabilité de souffrir de symptômes d’anxiété et de dépression.
Les difficultés de sommeil des travailleurs qui souffrent de THT sont souvent chroniques, ce qui les rend particulièrement vulnérables aux conséquences néfastes du travail de nuit et par quarts de travail irréguliers ou rotatifs. Par ailleurs, le THT est souvent accompagné d’un niveau d’anxiété significatif, notamment en ce qui concerne les conditions entourant le sommeil et les conséquences potentielles d’une mauvaise « nuit » de sommeil. Malheureusement, l’anxiété et les préoccupations par rapport au sommeil sont eux-mêmes des ennemis redoutables du sommeil. Il s’agit donc d’un cercle vicieux!
Le THT a non seulement des répercussions du point de vue de la santé des travailleurs, mais ce problème de santé publique engendre également des coûts financiers considérables pour la société (hausse de l’absentéisme et diminution de la productivité). De plus, le THT est associé à un nombre plus élevé d’accidents de travail et d’accidents de la route, dont les conséquences sont parfois fatales.
Heureusement, il existe des façons de briser cette séquence d’événements fâcheuse et ainsi de minimiser les conséquences néfastes du travail posté sur le sommeil et le bien-être physique et psychologique. Ces stratégies vous seront expliquées à travers les articles de ce module.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer les difficultés de sommeil associées au THT, mais c’est surtout le désalignement entre l’horloge biologique interne et l’horaire veille-sommeil exigé par l’environnement de travail qui serait en cause. Autrement dit, le corps reçoit un puissant signal de somnolence la nuit durant le quart de travail, alors qu’un niveau optimal de vigilance et de productivité sont requis. À l’inverse, le corps reçoit des signaux d’éveil et de vigilance durant la journée, l’unique fenêtre d’opportunité pour le sommeil chez les travailleurs de nuit et les travailleurs postés lors des rotations nocturnes. D’autres facteurs, tels que des niveaux de stress et d’anxiété exacerbés et l’isolement social, contribuent plus ou moins directement aux difficultés de sommeil chez les personnes occupant un horaire de travail non conventionnel. Bien souvent, les travailleurs de nuit ne passent pas autant de temps qu’ils le souhaiteraient avec leur famille et leurs amis en raison du conflit entre leurs horaires de vie privée et professionnelle.
Si votre horaire de travail cause du tort à votre sommeil et qu’il n’est pas possible d’y apporter des changements ou des ajustements pour adopter un horaire plus conventionnel, il existe heureusement des solutions. En effet, la thérapie cognitivo-comportementale de l’insomnie peut être adaptée au THT et est reconnue comme étant un traitement efficace dans cette population.